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28 mars 2010

Le paraître n'est pas un défaut

venus_genitrix_roman_hiLa référence au paraître est souvent péjorative dans la mesure où le terme se fait en quelque sorte indissociable de l'être. Comme si l'être n'envoyait et ne donnait à voir alors qu'une image tronquée, trompeuse, déformée de la réalité ...

Différentes acceptions se dégagent du mot ; il signifie "se présenter à la vue", "manifester sa présence", "être visible", "avoir l'apparence de" ou "se faire remarquer par une apparence avantageuse". C'est un mot qui touche au corps et fait appel aux sens. Il est ainsi chargé d'une forte subjectivité puisqu'en 'apparence', les choses ou les autres n'auraient qu'un caractère peu conforme à ce qu'ils sont en réalité ...

La racine étymologique « pare » se retrouve dans la parade, désignant « l’étalage que l’on fait pour se faire valoir » ; l’ancien sens de « se parer » est de « faire un effort pour se procurer » ; ainsi, il a pour but de «rendre propre à l’usage, à la consommation ». Enfin, dans une acception empruntée à l’italien « parare », il est attesté au sens de « éviter, protéger »... Le corps devient vite emballage, marchandise, faire valoir, destiné à faire voir, à vendre mais aussi à dresser une muraille qui abriterait une forteresse. Paraître pour mieux se cacher, pour mieux brouiller les pistes ou pour capter le regard de l’autre ?

Le paraître s’associe à l’illusoire, au superficiel, à une promesse non tenue. Or, c’est par la vue dans un premier temps, puis par notre sensibilité et notre intuition immédiate, que nous parvenons à cet aspect du réel. La vue est un des sens les plus investis dans la découverte de soi lors de l’épreuve du miroir, puis dans la relation à l’autre. Tout contact avec autrui est d’abord visuel : dans la séduction ou dans l’affrontement, l’échange passe par le regard et ce, dès la plus tendre enfance... Au fond, que cherchons-nous dans les yeux de l’autre si ce n’est notre propre reflet ? Narcisse ne recherchait-il pas son double ?

Conditionnés par un environnement qui bannit la routine, se montrer différents s’apparente aujourd’hui au dynamisme. Dans un monde où tout bouge et de surcroît très vite, l’individu — même s’il rencontre quelques tourments à devoir s’adapter en permanence — bénéficie malgré tout d’une permission : celle de se mettre en valeur et de pouvoir en vérifier le résultat positif. Le XXIème siècle ne fait plus de l’application à donner à voir le meilleur de soi une pression insupportable. Il n’y a pas si longtemps que ça, il n’était pas rare de croiser une jeune femme dans la rue bigoudis sur la tête ! Les coiffeurs l’ont compris : la gent féminine a besoin de se sentir bien dans sa tête dès le saut du lit... Les coupes de cheveux — coiffé, décoiffé — sont un exemple parmi tant d’autres qui vont dans le sens d’une alchimie singulière : le moche peut se révéler beau. Autrement dit, la mocheté ça n’existe pas !
Voilà bien des décennies que tous les secteurs font montre d’une créativité à toute épreuve en transformant un objet du passé et en le réactualisant (les antiquaires, entre autres, ne s’en privent pas et nous donnent même des idées pour notre plus grand bonheur). Faire du neuf avec du vieux c’est, quoi qu’il en soit, ce que font les scientifiques aussi. Il s’agit, pour la psychanalyse, du processus dit de symbolisation. Le paraître n’est donc pas un défaut. À la seule condition cependant qu’il garde sa véritable fonction celle d’accueillir et de (se) rendre aimable...

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