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Alias Clory
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11 décembre 2009

Trop d'amour tue l'amour !

Aimer son prochain comme soi-même ? Facile à dire selon Freud. Il voit dans ce commandement inapplicable le meilleur moyen d'abaisser la valeur de l'amour. Et d'augmenter le nombre de névrosés.

Malaise dans la civilisation (S. Freud) - L'homme est un loup pour l'homme

Le problème consiste à écarter l'obstacle le plus grand rencontré par la civilisation, à savoir l'agressivité constitutionnelle de l'être humain contre autrui : d'où l'intérêt tout particulier du plus récent des commandements du Surmoi collectif : "Aime ton prochain comme toi-même". L'étude des névroses ainsi que leur traitement nous amnent à formuler deux objections au Surmoi de l'individu : par la sévérité de ses ordres et de ses interdictions, il se soucie trop peu du bonheur du Moi, et d'autre part il ne tient pas assez compte des résistances à lui obéir ; de la force des pulsions du soi et des difficultés extérieures. Ainsi sommes-nous très souvent obligés, dans un but thérapeuthique, de lutter contre lui et nous efforçons-nous de rabaisser ses prétentions.

Or, nous sommes en droit d'adresser des reproches très analogues au Surmoi collectif touchant ses exigences éthiques. Car lui non plus ne se soucie pas assez de la constitution psychique humaine : il édicte une loi et ne se demande pas s'il est possible à l'homme de la suivre. Il présume bien plutôt que tout ce qu'on lui impose est psychologiquement possible au Moi humain, et que ce Moi joit d'une autorité illimitée sur son soi. C'est là une erreur ; même chez l'homme prétendu normal, la domination du soi par le Moi ne peut dépasser certaines limites. Exiger davantage, c'est alors provoquer chez l'individu une révolte ou une névrose, ou le rendre malheureux. Le commandement : "Aime ton prochain comme toi-même" est la la fois la mesure de défense la plus forte contre l'agressivité et l'exemple du meilleur des procédès antipsychlogiques du Surmoi collectif. Ce comandement est inapplicable, une inflation aussi grandiose de l'amour ne peut qu'abaisser sa valeur mais non écarter le péril.

La civilisation néglige tout cela, elle se borne à décréter que plus l'obéissance est difficile, plus elle a du mérite. Seulement, celui qui dans l'état actuel de la civilisation se conforme à pareille prescription ne fait qu'agir à son propre désavantage au regard de celui qui se place au-dessus d'elle. Quel obstacle puissant à la civilisation doit être l'agressivité si s'en défendre rend tout aussi malheureux que s'en réclamer ! L'éthique dite naturelle n'a rien ici à nous offrir que la satisfaction narcissique de pouvoir nous estimer meilleurs que les autres. L'éthique qui s'apppuie sur la religion, agite ses promesses d'un au delà meilleur.

"Tant que la vertu ne sera pas récompensée ici-bas, l'éthique prêchera dans le désert".

malaise_civilisation_L

Le "malaise dans la civilisation", que Freud dénonçait en 1929, renvoyait pour lui à l'existence d'une souffrance humaine intrinsèque et par là structurale.
En son temps, c'est sous des formes classiques -névroses, psychoses, perversions qu'elle se traduisait. Mais aujourd'hui, sous l'effet des modifications du lien social, apparaissent de nouvelles organisations psychiques telles que les états-limites, les addictions, les "agirs" pathologiques... Du même coup, voient le jour de nouvelles formes de souffrance mentale, - dépressions, manifestations psychosomatiques, échec scolaire -, qui sont autant de révélateurs de notre civilisation contemporaine: d'une civilisation qui devra repenser les modes de catégorisation clinique de son malaise ainsi que les réponses qu'elle lui apporte à travers la voix du clinicien.

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